Comédienne et metteuse en scène pour le théâtre, Ariane Séguillon est célèbre pour ses différents rôles dans des séries télévisées et notamment Demain nous appartient. En 2022, elle publie un roman “La grosse” dans lequel elle aborde son combat contre la boulimie.
Du mal-être à la boulimie
Ariane Séguillon :
« Quand on a envie de se détruire, c’est en général qu’on ne va pas bien. Je ne connais pas de gens heureux qui ont envie de se détruire, or manger à outrance, en permanence, c’est une forme de destruction et c’est même un suicide, un lent suicide mais un suicide quand même. »
« Aujourd’hui je me soigne ! Je suis toujours en thérapie et je pense que j’y serai encore très longtemps… J’ai un trop grand passif pour pouvoir arrêter, mais je dirais que je vais plutôt bien, ça dépend des moments. J’ai traversé des périodes assez difficiles, mais dans mon travail, ça va, le reste viendra. »
« J’ai toujours trois ou quatre kilos en trop. Ça dépend des moments, mais comme beaucoup de femmes. Quand j’avais 18 ans, j’étais top model visage, j’étais objectivement sublime mais lorsque je voyais des photos de moi, je me trouvais atroce ! Ce n’est donc pas une question de physique finalement, c’est une question d’amour de soi. C’est un apprentissage, un long chemin et je suis sur ce chemin, j’apprends… »
"Body positif", une arnaque selon Ariane Séguillon
A.S. :
« Lorsqu’on est obèse, on vous rappelle en permanence que vous êtes moche, que vous êtes différent. De manière globale, la différence est extrêmement mal tolérée chez l’être humain. Les gens détestent la différence.
Maintenant, on nous parle de body positif et ça me fait rire, parce qu’à partir du moment où on parle de body positif, c’est qu’il y a encore un problème : on ne dit pas à quelqu’un qui a une forme “normale”, c’est-à-dire : “mince”, qu‘elle est body positive ! Etre body positif, qu’est-ce que ça signifie au fond ? Ça veut dire accepter son corps tel qu’il est mais il reste différent, donc ce n’est pas réglé, loin de là. Les États-Unis sont beaucoup plus en avance que nous au niveau de l’obésité. Il faut dire qu’ils sont beaucoup plus nombreux. Ashley Graham est une bombe atomique obèse. En France, l’obésité est assez récente. C’est la malbouffe qui a amené l’obésité en France, nous sommes un pays où l’on mangeait, à l’origine, de manière très diversifiée. Pour sortir de l’obésité, on vous demande de manger comme le faisaient nos grands-mères : une protéine, un féculent et une légumineuse à chaque repas. Nos grands-parents mangeaient de tout et même des plats en sauce. On peut manger de tout, en quantité normale. En Europe, nous avions un bon rapport à la nutrition et nous sommes en train de perdre cet avantage. »
Sport et obésité
A.S. :
« J’ai toujours été une grande sportive, même lorsque je suis montée à 110 kilos mais, à ce moment-là, évidemment, je ne pratiquais pas le sport avec la même intensité. Je m’étais faite un peu disputer par mon médecin qui m’avait mise en garde avec mon coeur. Quand on est en situation d’obésité, le cœur travaille beaucoup, parce qu’il lui faut porter ce poids. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de porter 60 kilos dans les bras ? 60 kilos, c’est impossible à soulever. »
Taille 36 exigée !
Ariane Séguillon :
« Oui, j’avais décidé d’arrêter le métier pendant quelques temps, puisque les rôles qu’on me donnait ne m’intéressaient pas. Je suis une touche à tout. J’ai fait beaucoup de métiers dans ma vie.
Quand j’étais directrice de boutique, j’ai découvert à quel point les tailles étaient minuscules ! A l’époque où je travaillais là-bas, j’étais toute fine, je faisais un 34-36 et je mettais une taille 2. Vous vous rendez compte ? Une taille 2 devrait correspondre à un 38-40 ! Cela signifie que la taille 3 était censée être un grand 40 et chez Maje c’est un 38… Et pour 80 % des marques un peu branchées en France, on ne va pas au-delà de la taille 3. C’est-à-dire qu’on ne peut pas s’habiller à partir du moment où on dépasse le 40, 42. Tant pis pour les grandes, celles qui ont des formes… Parfois, je les voyais entrer dans le magasin et je me disais : “Elle ne va pas rentrer dans quoi que ce soit.” Et certaines m’en voulaient parce que je n’avais pas leur taille, mais je devais leur répondre que ça s’arrêtait à la taille 3 et que j’étais désolée. »
S'engager pour s'épanouir
A.S. :
« S’engager, c’est très compliqué. Je ne sais pas si ça apporte du bien-être, mais ça donne de la force. Quand on a été victime d’injustice, ça impacte toute une famille. Chez moi, il s’agit de mon petit frère en l’occurrence. Si on ne se bat pas, je pense qu’on tombe, ou alors il faut un égoïsme géant que je n’ai pas la chance d’avoir. C’est une chance, selon moi, d’être très égoïste. Les gens vont être très choqués que je puisse dire ça, mais je le pense : réussir à penser à soi, parfois avant tout le monde, c’est une grande forme d’intelligence, que je n’ai pas. »
Ariane Séguillon : son combat contre la pédophilie
Ariane Séguillon :
« En France, c’est absolument dramatique. Un pédophile ne risque pratiquement rien. D’ailleurs, j’ai encore fait un post suite à la campagne sur la pédophilie que vient de médiatiser le gouvernement français. C’est super de faire des campagnes, mais ils parlent d’un numéro de téléphone et pour avoir essayé d’appeler : 90 % du temps, on ne vous répond pas ou on vous dit qu’on va vous rappeler. C’est compréhensible, ils sont débordés, mais quand ces enfants, qui sont terrorisés, ont le courage de parler, que des femmes osent divorcer, on continue à envoyer ces enfants chez l’autre parent. Et si les femmes vont au tribunal, elles risquent d’aller en prison. Elles font, en général, de la garde à vue quand elles se battent pour ne pas donner les enfants. En France, c’est une catastrophe. Et même les femmes victimes de viols ne peuvent pas grand-chose sans preuves tangibles. Je le vois au quotidien, dans l’association Carl qu’a monté Steffy Alexandrian, une femme extraordinaire, qui a vécu l’enfer et qui se bat tous les jours : on n’avance pas, il faut enfin des lois et que ces lois soient appliquées. Je crois aussi que les choses avanceraient mieux si les jugements étaient rendus par des femmes. Pour l’instant, elles sont beaucoup plus aptes à juger au sujet des enfants. C’est comme ça, c’est une question de ventre. Est-ce que ça me permet d’aller mieux de me battre ? Dans tous les cas, ça me permet d’être plus forte et de me sentir utile. »